dessin

portraits en chasseur

Publié par Anouk Lejczyk

Journal du projet

Hervé est chasseur et m'a remerciée d'avoir "pris le risque de l'inviter", malgré les nombreux débats, souvent houleux, qui entourent sa pratique. C'est précisément pour cela que j'y tenais : la chasse faisant partie de la vie des forêts françaises, il s'agissait prendre en compte cette réalité et de ne pas s'en tenir aux tabous et aux stéréotypes, en accueillant la parole directe d'un homme qui connait bien les animaux, semble les respecter beaucoup, et fait pourtant le choix d'en tuer certains. Car Hervé, comme une partie de ses collègues chasseurs, vit dans un territoire où cette relation-là existe encore et lui a été transmise. Il pratique la chasse par goût de ces moments de traque silencieuse en dehors des flux communs, et avec la conscience de s'inscrire dans une relation au vivant qui n'est pas exempte de violence. Depuis son enfance, la pratique de la chasse lui a appris à observer la forêt et à comprendre, en partie, les mouvements qui s'y déroulent. Il existe certes d'autres voies d'apprentissage, mais celle-ci à été la sienne et s'inscrit dans une tradition millénaire.  A cet égard, il me paraissait intéressant de confronter ce savoir complexe aux visions - elles-mêmes contrastées - des enfants. En outre, la plupart d'entre eux connaissaient déjà, dans leur entourage, au moins quelqu'un qui pratique la chasse : l'idée ne leur était pas exotique. Ecoute attentive des récits d'Hervé, fascination pour ses trophées de chasse et questionnements quant à la dangerosité de la pratique et au sentiment de pitié, se sont mêlés lors de cette rencontre. La présence de Denis, non-chasseur mais lui aussi passionné par les animaux sylvestres, a permis d'apporter un contrepoint tolérant et amical, finalement proche de la position que les élèves ont semblé majoritairement adopter.

Extraits de comptes-rendus à la 1ère personne (dans la peau du chasseur) écrits par les élèves :

"Bonjour, je m’appelle Hervé, je suis chasseur. J’adore le nature. Je chasse plusieurs sortes d’animaux comme les sangliers, les renards et quelquefois des  chevreuils. J’ai commencé à chasser à l’age de 16 ans. Ça va faire bientôt 50 ans que je chasse ! Une fois, j’ai eu un moment inoubliable: car j’ai vu un magnifique cerf qui avait une couleur noisette. Quelquefois je trouve des morceaux de bois. J’habite à Reims, mais je viens des Ardennes. Pour reconnaître les animaux nous prenons une sorte de bracelet pour ne pas confondre avec d’autres animaux. Je suis venu avec mon ami Denis qui lui ne chasse pas  mais est passionné de nature, il adore ça, il connaît plusieurs sortes d’animaux. Comme le brocard (le mâle chevreuil) et la laie (la femelle du sanglier). Il va vous faire participer à un quiz."

"Je m’appelle Hervé je suis chasseur et j’habite à Reims. Je chasse avec un fusil et je tue des lapins, aussi quelques renards, des biches, des sangliers, mais par contre, je n’ai pas le droit de chasser des loups. Une fois, j’ai vu un accident de chasse et j’ai sauvé la vie de quelqu’un qui faisait un arrêt cardiaque en lui faisant un massage cardiaque. Il n’y a que nous les chasseurs qui payons les dégâts de l’agriculture causés par les animaux. Comme les renards parfois qui viennent manger les poules, ou les sangliers qui abiment les terrains ; les dégâts on les paye en achetant des bracelets pour chaque animal mort, l’argent est reversé aux agriculteurs… J’ai amené des bois grands et petits aux élèves de CM1 et CM2. Ils ont été impressionnés quand ils les ont vu ! On est allé dans une forêt qui s’appelle le Camp romain et je leur ai montré des nids d’oiseaux ou d’écureuil qui étaient dans des arbres et ils devaient deviner à qui appartenaient les nids qu’on voyait, et s’ils devinaient, ils gagnaient un petit cadeau : un stylo !"

"Je chasse depuis mes 16 ans, maintenant ça fait 50 ans que je chasse. Pour tuer les oiseaux, j’utilise une carabine à plombs mais pour les gros animaux comme les sangliers ou les cerfs j’utilise un fusil avec de vraies balles pour ne pas qu’ils souffrent. Je trouve des bois de chevreuils ou de cerfs de temps en temps. Je n’ai pas le droit de tuer des bêtes de têtes, des laies meneuses et des laies suitées par exemple. Les renards et les souris mangent les bois de cerfs ou de chevreuils tombés par terre parce qu’ils sont plein de vitamines. J’adore la chasse mais certaines choses coûtent cher comme les bracelets pour les sangliers morts (ils coutent 80€). Mais bon, j’aime tellement la chasse que je continuerai toute ma vie."

"Je sais où sont cachés les animaux comme par exemple les sangliers, ils se cachent dans les ronces car ils aiment bien être tranquilles. Et en effet, j’ai déjà eu pitié d’un animal. Nous les chasseurs, on est obligé de tirer sur les animaux demandés, par exemple s’il faut qu’on ramène 24 sangliers morts, on est obligé d’en ramener 24 pas plus pas moins. Sinon, c’est possible qu’on ait une amende ou même qu’on soit renvoyé ! Une fois, j’ai croisé un chevreuil magnifique que je n’ai pas voulu tirer. J’ai répondu à beaucoup de questions des élèves, sur le thème de la chasse. Ensuite, mon ami Denis a fait faire un quiz aux enfants sur les animaux de la forêt. Pour finir, j’avais ramené des bois. C’était une très bonne journée !?"