LES TRACES LAISSÉES DE NOS RENCONTRES // Gil Browaëys. (1/3)

« C'est une sorte d'antre insoupçonné implanté au milieu de la campagne, un repaire d'artistes d'où s'échappent de la rue des fous rires et des bribes de voix grossières. On rencontre Gil et sa femme qui s'activent à l'alimentation de leur four à bois, une construction en briques de plusieurs mètres de haut installée dans leur jardin, centre de toute leur attention pour la journée – de sept heures ce matin à vingt-deux heures ce soir. Le couple est accompagné par une bande d'ami·es venu·es leur prêter main forte. Entre tasses de café et apéritif, nous discutons de la cuisson des pièces en céramique (types de fours, courbe des températures, alimentation, émaux, etc). Autour de nos yeux béats et inexperts s'active une chorégraphie régulière formée par la manipulation et le transport du bois, l'enfournement des bûches, la vérification des montres fusibles, le contrôle de la position des briques et de la couleur des flammes. Tout un savoir-faire que nous ne connaissons pas mais qui nous fait briller les yeux.

La journée passe vite. Vers vingt-deux heures, au moment d'enfourner le dernier morceau de bois et de boucher l'ouverture du conduit de cheminée, l'éclairage extérieur s'éteint et nous découvrons le scintillement des flammes rayonnant à travers la jointure des briques. Forme lumineuse éclatante au milieu de la pénombre nocturne.

Nous reviendrons quelques jours plus tard afin de déposer pour être cuites les plaques qu'ont fabriquées les élèves. »

De ces visites, il restera :

- trois montres fusibles courbées

- un volume de bois autrefois existant qui maintenant n'est plus

- de nouveaux mots découverts

- la fatigue des corps

- les restes d'un repas partagé

- des briques réfractaires recouvertes d'une nouvelle couche de cendres vitrifiée

- une montagne de fines particules de charbon de bois et de poussière

Texte : Adèle Daubercies