Répétitions dans le Gymnase du Vignau

Quarante-neuf [ Asja ]

Publié par Camille Plocki

 

 

 

 

 

Les CM1/ CM2, classe de Fabrice Rechede
Les CM1/ CM2, classe de Fabrice Rechede

Quarante-neuf. Deux classes, du CE2 au CM2. L’une de vingt-six enfants et l’autre de vingt-trois.
Nous avons cinq semaines pour les rencontrer et travailler avec chaque lundi, mardi, jeudi et vendredi. Nous sommes trois : Camille, Agathe et moi, Asja.
Une grande partie du travail fut d’organiser les groupes, le temps et l’espace pour approfondir le travail avec tous. Ça n’a pas été une mince affaire, mais je crois que nous y sommes plutôt bien arrivées !

Les CE2/CM1, la classe de Sarah Rossoni
Les CE2/CM1, la classe de Sarah Rossoni

La première semaine Camille a rencontré chaque enfant par petits groupes et leur a posé quelques questions après avoir fait des échauffements. Parallèlement la plupart des CM1/CM2 ont interrogé leurs grands-parents et les CE2/CM1 ont imaginé la suite de l’histoire de Lily atteinte de la maladie de l’oubli.

Avec cette première matière, nous avons constitué, la deuxième semaine, trois groupes chez les plus petits et trois groupes chez les plus grands. Afin de les rencontrer chacun notre tour et de leur proposer chacune des exercices d’initiations et de développer la recherche.

Après chaque séance je proposais toujours un temps d’échange et de retours sur ce qu’on venait de traverser, ce qui me permettait de discuter avec chacun d’entre eux (CM1/CM2), en les dirigeant doucement vers des questions plus en lien avec notre sujet : Sur la vieillesse, les souvenirs, les différents-âges de la vie, le futur, les désirs, la mort, et après la mort… Je les laissais débattre entre eux et enregistrais en même temps leurs réflexions. Comme ils discutaient les uns avec les autres, j’étais souvent face à des situations passionnantes où ils se répondaient les uns aux autres, rebondissaient, et allaient là où la pensée les amenait. Parfois le théâtre pointait le bout de son nez et des situations très claires s’immisçaient dans le chaos apparent.   

Lino, Gabin, Nolan et Léo
Lino, Gabin, Nolan et Léo

Toute cette matière, outre les interviews avec leurs grands-parents, m’a donné envie d’écrire une courte pièce pour les plus grands en partant de leurs propres dires et réactions. Pour ceux plus timides et pour qui prendre la parole est moins évident, je leur ai écrit des bouts de texte.
Pour que ce soit un spectacle collectif et non trois groupes qui se succèdent, j’ai pensé à créer trois séquences pour chaque groupe, indépendantes les unes des autres. Ce qui a donné 9 séquences que nous avons pu mélanger. J’ai pris soin de donner la parole à chacun de façon plus ou moins équilibrée. Parfois ils prennent en charge la parole de leur propre grand-mère ou grand-père, puis redeviennent eux-mêmes.

En écrivant la pièce, j’ai eu peur que ce ne soit pas évident pour eux de « jouer leur propre rôle ». Je me demandais s’ils n’allaient pas être surpris de ne pas jouer de « personnages » mis à part les moments ou ils interprètent leurs propres grands-parents. La première lecture, qui a eu lieu en début de troisième semaine, a atténué mes doutes. Se lire et se reconnaître les a fait beaucoup rires, retrouver quelques-unes de leurs paroles par-ci par-là.  Et ils semblaient ne pas se poser la question du personnage. Ils allaient devoir jouer devant du monde et je les sentais très motivés et soucieux de l’apprentissage du texte.

Clara et Arthur
Clara et Arthur

Quelle fut notre surprise quand nous avons découvert, à la fin de la semaine lors de la présentation d'une première étape de travail, qu’ils connaissaient pratiquement tous leur texte.
Nous avons travaillé avec un groupe chacune, le même toute la semaine. Le matin avec les plus petits (Camille a écrit le spectacle sous forme de trois séquences que nous devions chacune mettre en scène) et l’après-midi avec les plus grands. Chaque après -midi nous travaillions une séquence et le vendredi nous nous sommes présenté le travail, là où ils en étaient, devant l’autre classe et les professeurs.

Avoir pris la décision d’une échéance de présentation publique à la fin de la troisième semaine leur a permis de rendre concret le projet et d’être dans une vraie dynamique de travail. C’était très beau à voir. Ils se sont portés vers le haut, même ceux pour qui la concentration n’était pas toujours au rendez-vous.

Mise en scène de "Nous, grands-parents !"
Mise en scène de "Nous, grands-parents !"

La quatrième semaine fut entièrement consacrée à la mise en scène des deux spectacles. Le matin avec les plus petits, et l’après-midi avec les plus grands. Nous avons gardé les mêmes groupes. Au début de chaque début de séance, nous faisions un échauffement collectif suivi d’un exercice. Puis nous nous répartissions les groupes. Cette période de travail a été très enrichissante pour eux, et aussi pour nous. Tout au long du travail, je me suis rendu-compte que je ne pouvais pas faire autrement que d’être dans l’empathie. A la fin de la journée je me sentais comme une enfant, sans filtre, à réagir à chaque détail, et surtout, tout me faisait rire. J’étais fatiguée, mais j’aimais beaucoup cet état, je me souvenais des sensations de l’enfance. Cela me permettait de mieux comprendre telle ou telle situation par lesquelles ils pouvaient passer, mais aussi de trouver une autorité sans abuser de mon statut d’adulte.

La salle des fêtes du Vignau est prête !
La salle des fêtes du Vignau est prête !

Enfin, la dernière semaine : Les deux représentations ont eu lieu. Le jeudi soir à 19h30 dans une chaleur caniculaire et devant 200 personnes à la salle des fêtes du Vignau et le vendredi à 14h30 devant plusieurs résidentes et résidents de l’Ehpad d’Aire sur Adour. C’était magnifique. Jouer deux fois et dans deux lieux différents leur a permis de s’adapter à différents espaces, de rencontrer un nouveau public, une nouvelle écoute, d’avoir envie de faire mieux que la veille, sans compter tous leurs secrets.

Vendredi à 17h30 c’est le moment de partir. On pleure devant le bus. On se dit au revoir avec nos mains et nos yeux. On est heureux. Je suis dans le train du retour, je termine cet article la gorge nouée et tous leur sourire dans mes yeux.


Asja

A très bientôt !
A très bientôt !