Sous mes doigts, le paysage

Sous mes doigts, le paysage

Publié par Violette Tournilhac

Journal du projet

Les élèves attendent, impatients, dans la salle de classe. Ce matin, "l'artiste" va venir. Je suis devant la porte, les bras chargés, prête à entrer dans l'espace scénique de la salle de classe.

Mardi 9 janvier: Voici mes outils ! La carte IGN, le livre de géologie, la pochette imperméable, les chaussures de marche. Et puis nous parlons des formats A3, A5 : feuilles blanches, carnet blanc. Viennent les techniques : encre de Chine, stylo plume, peintures et aquarelle... autant de moyens pour bientôt les remplir, et donner du sens au vide des supports, une direction à leur espace, une profondeur à leurs deux dimensions. Dans quelques heures, jours, mois- ils seront quelque chose plutôt que rien. Ces feuilles seront bientôt couvertes du crissement des branches, du murmure de la rivière, des coups d'éclat du soleil et de rires d'enfants.

Jeudi 11 janvier : Regardez ! Je reviens d'exploration. Voici des pierres et des peintures, voici des notes et des croquis, et puis voici ma joie à vous parler de la beauté que j'y ai vue. Qu'en pensez-vous ? Reconnaissez-vous les lieux, les techniques ? Trouvez-vous cela beau ? Pourquoi ? Vous savez, toutes les montagnes deviennent des grains de sables au fond des rivières. La Loire n'a pas toujours coulé ici, au fond de ce vallon... le relief s'est inversé, le volcanisme a tout changé. La rivière est partie couler dans les roches les plus tendres, et Cussac est désormais sur le flanc d'un plateau.

Vendredi 12 janvier : Ce que j'aime, dans votre pays, ce sont les lichens. Les avez-vous vu ? En voici des photos. Ils sont jaunes, verts, gris, blanc. Je prends en photo mes pieds pour donner une échelle : sans eux, qui connaîtrait la taille de cette pierre ? De même, ce personnage sur l'image nous indique la taille des arbres de la ripisylve. C'est du latin : ça veut dire "forêt de la rivière". Observez la photo : pourquoi ai-je choisi ce cadrage ? Qu'ai-je voulu dire ? Regardez les pierres sur ce muret : elles soutiennent le talus ! Sans le linteau et l'appui de fenêtre, le mur de cette maison s'effondrerait. Les hommes bâtissent en observant beaucoup. C'est beau, non, ces pierres de lave noire et ces joints blancs!