À partir d’un personnage fictif nommé F en référence au mythe amérindien « le Fripon Divin », je questionne des enjeux d’incarnation par le corps, la gestuelle et l’interaction. Ce personnage traverse et habite des médiums aussi divers que la sculpture, la vidéo ou l’installation, au même titre qu’un personnage de fiction qui traverse différentes situations, différents épisodes. Pour Création en cours, je souhaiterais réaliser un film en images de synthèse (en 3D) dans lequel F serait l’un des protagonistes. F se confronterait à d’autres corps, construits, pensés, et animés par les enfants, à partir de l’observation et de l’étude de comportement et d’interactions de différentes espèces animales. En passant par la motion capture, et s’appuyant sur un ensemble de recherches faisant appel aux domaines de la danse, du conte et du cinéma, j’envisage cette proposition comme un moyen de questionner, à travers l’idée d’un corps changeant, celle de la définition de nos propres corps.
F est un personnage qui emprunte à une statuette antique (visuel 1) certains de ses traits, dont ses bras courbes et enroulés vers le buste qui est sans doute sa caractéristique physique la plus remarquable. Si F s’appelle ainsi, c’est en référence au Fripon divin, dont le personnage éponyme du mythe amérindien, semi-divin, provocateur et au caractère chaotique, traverse plusieurs aventures dont les récits se transmettaient traditionnellement à l’oral avant d’être progressivement couchés sur le papier. Tout comme le Fripon divin se déplace et rencontre tour à tour divers interlocuteurs et situations, F, à travers son corps aux bras incurvés, traverse vidéos, sculptures, et installations.
F est comme une sorte de motif, de personnage symbole qui me sert de prétexte.
F a une particularité, F peut changer son corps en se métamorphosant.
C’est à partir de cette affirmation que le projet se cristallise en se focalisant sur cette question du dépassement d’un comportement grâce à l’invention d’un autre corps et par conséquence de sa gestuelle.
A partir de l’observation et de l’étude de comportement et d’interactions de différentes espèces animales un catalogue de gestes, de réactions et de fonctionnements serait construit. Ce catalogue pourrait prendre la forme de dessins, de vidéos courtes de petites sculptures en pâte à modeler. De paire, j’aimerais poursuivre cette idée par la création d’un bestiaire.
Au cœur du projet F:métamorphe un film en images de synthèse qui porterait sur cette transformation corporelle et comportementale de F grâce à sa métamorphose. F évoluerait alors dans un environnement peuplé de bêtes issues du bestiaire.
Je voudrais utiliser une technique de capture de mouvement appelée motion capture qui permet grâce à une interface (combinaison ou caméras spécifiques) de capturer très précisément des mouvements et de les appliquer à un modèle 3D.
Cette technique, largement employée dans le cinéma, m’intrigue notamment sur un point : l’acteur prête son corps et devient surface de projection pour un corps qui n’est pas le sien et pour lequel il se transforme, prend littéralement la gestuelle, le comportement. Certaines personnes en sont devenues spécialistes, comme l’acteur Terry Notary, qui, sollicité pour le film La planète des singes (2011-2017) était en charge de former les acteurs au jeu simiesque.
(https://www.youtube.com/watch?v=-UWpfZrWFY4)
De la même façon que Terry Notary a de se penser singe pour en devenir un à l’écran, J’aimerais inviter un-e danseur-euse à venir travailler à l’incarnation de ce corpus gestuel retranscrit dans le film grâce à cette technique de motion capture.
Si ce dédoublement m’intéresse, c’est parce qu’il permet, à travers l’incarnation d’un autre corps que le sien, de sortir de son corps et de ses mouvements, et d’en imaginer un autre pour mieux revenir sur nos comportements présents.
J’aimerais mettre en parallèle de cette métamorphose les études d’Antoinette de Rouvray portant sur le futur de nos comportements sociaux en vue de l’avènement des Bigs Datas, de laquelle je dégage l'interrogation suivante :
Le décentrement corporel et gestuel nous permettraient-ils de combattre l’homogénéisation grandissante de nos comportements ?
Par le(s) artiste(s)