Notre physicalité et expressivité étant très différentes l’une de l’autre, nous en avons fait une force et un atout majeur. L’une, aérienne et délicate, est issue des techniques Cunningham, Graham et de l’expressionnisme allemand ; l’autre, plus tourbillonnante et enracinée, est façonnée par les techniques de FloorWork et Partnering. Cette combinaison atypique est le socle de notre matériel chorégraphique. Ombre / Être est une création basée sur l’exploration de la diversité de nos qualités, la relation d’interdépendance entre l’être et l’ombre, son interprétation, sa nature imaginaire et symbolique, la place de la lumière indispensable à la création de l’ombre et à la vision de l’être. Et si l’ombre…
Une semaine de travail nous a permis d’aboutir à un premier fragment d’une dizaine de minutes présenté lors de la semaine de la danse à l’Ecole Municipale Artistique de Vitry-sur-Seine (94). Les réactions de ce public d’âges variés nous encouragent vivement à poursuivre notre création. Nous souhaitons affiner et développer notre langage chorégraphique en poursuivant notre recherche de matière corporelle définie par nos parcours respectifs. Désireuses d’associer ces différences afin de sublimer les qualités de l’autre, l’évidence s’est imposée que l’une évoluerait principalement debout et l’autre au sol. La réflexion sur la place de chacune nous a rapidement évoqué l’image d’un être et de son ombre. Intéressées par cette relation, le dialogue entre ces deux entités s’est installé nous embarquant dans une communication, une recherche de l’autre et de l’existence de chacune. Entre reflet, unisson et point d’équilibre, le contact devient évident dans ce contexte d’étayage et de quête de l’autre. La personnification de la projection questionne sur l’identité et l’interprétation de l’ombre. La considérant vivante, peut-être dotée d’intelligence et d’émotions, elle peut réagir et anticiper nos actes. Elle serait alors capable de nous récupérer lors d’un saut, de nous retenir lors d’une chute, ou tout simplement de nous accompagner et nous soutenir lors de nos expériences du monde qui nous entoure, ayant ainsi un rôle protecteur. Notre réflexion sur la relation entre l’être et l’ombre nous a amené à considérer l’importance de la lumière dans notre travail. Indispensable à la vision de l’être et à la présence de son ombre, la lumière est la suite logique de notre recherche. Nous voulons identifier les diverses sources de lumières intégrables à notre travail, en explorer les multiples utilisations et les jeux de lumière. Nous pourrons ainsi définir le matériel scénographique nécessaire à notre duo, en utilisant des objets de la vie quotidienne (un lampadaire, un projecteur, une lampe torche, etc). Dans un contexte de questionnement sur la place de l’être, de l’ombre et de la lumière, nous souhaitons approfondir notre recherche et explorer les différentes interprétations possibles. Nous voulons interagir avec l’imaginaire d’un jeune public, composé principalement d’enfants de 4 à 12 ans, afin d‘interagir et d’intégrer à notre travail leur vision sur la relation existante entre ces trois entités. Vont-ils se créer une histoire ? Combien de personnes vont-ils voir ? Ont-ils considéré l’ombre en tant qu’objet ou en tant que personne ? Quelle interprétation vont-ils donner à l’ombre personnifiée ? Que voudraient-il voir par la suite ? Comment imaginent-ils l’évolution de la relation entre l’ombre et l’être ? Dans un second temps, nous aimerions connaitre l’impact éventuel de notre présentation sur leur conscience du mouvement dansé et sur le jeu entre la lumière, leur corps et l’ombre. Sont-ils plus sensibles à leur ombre ou à celle des autres ? Comprennent-ils sa provenance ? La considère-t-elle comme vivante ? La/les regarde(nt)-elle(s) ? Jouent-ils avec elle(s) ? Pour répondre à ces questions nous organiserons la rencontre en trois temps : un premier temps de présentation de notre travail, suivi d’un moment d’échange, de questions et de réponses, pour terminer par un atelier d’exploration permettant aux enfants d’expérimenter à leur tour. Suite aux réactions suscitées lors de l’échange nous approfondirons ce début de recherche et poursuivrons notre création en considérant ses nouveaux regards.
Allier
Par le(s) artiste(s)