Qu'est-ce qu'habiter un lieu ? De quelle manière définissent l'urbanisme, l'architecture et le design notre manière de vivre et d'utiliser l'espace ? Comment est-ce que les matériaux influent sur nos sensibilités ?
DO.MI.SI.LA.DO.RE propose de (re-)découvrir les ressources d'un territoire pour réaliser des objets vernaculaires permettant de repenser les normes d'après lesquelles sont conçus les objets design .
En dialogue avec les élèves de l'établissement, Maria Jooyoung propose d'imaginer puis de réaliser un lieu pensé et modelé avec les élèves, avec l'aide d'artisans locaux.
DO.MI.SI.LA.DO.RE est la suite de Standard Ideal, ensemble d'installations sculpturales amorcées en 2018 par Maria Jooyoung et Steven Thelen sous le nom de Jaqmar Venthel.
À travers DO.MI.SI.LA.DO.RE, il s'agit d'explorer avec les élèves la notion d'habiter de manière didactique et concrète, en créant un espace et des objets sculptures, en puisant dans les ressources ihstoriques et artisanales locales.
Amorcé en 2018 avec Europa White (Everything’s the shame) et Standard Ideal, DO.MI.SI.LA.DO.RE est la poursuite et l’approfondissement d’une pratique de sculpture et d’installation développée in situ, mêlant techniques de travaux du bâtiment, objets et meubles préfabriqués et pratiques artisanales.
C’est une recherche formelle questionnant les particularités et les standards de notre environnement quotidien contemporain et les esthétiques propres à l’habitat “moderne”.
“Le lisse est la signature du présent. […] Le lisse ne blesse pas. De lui n’émane aucune résistance.” Sauvons le Beau, Byung-Chul Han, Fischer Verlag
Dans des installations où les matériaux nobles côtoient le contreplaqué, le faux bois jouxte les vrais porte-serviettes chromés, j’ouvre et j’explore des failles en détournant, remodelant et défonctionnalisant les objets-protagonistes.
Il s’agit de fragiliser cette esthétique “épurée”, froide et ultra-lisse et d’y créer des irritations, des fuites à l’aide de propositions organiques et précaires, de gestes instinctifs et poétiques, ou de sculptures bâtardes, déconcertantes et glabres.
En reconsidérant notre environnement matériel proche jusque dans les détails, le déjouant, le déstandardisant et le reformulant, on peut le revaloriser et se l’approprier pleinement.
Avec DO.MI.SI.LA.DO.RE, je souhaite poursuivre cette recherche plastique en puisant dans les ressources culturelles locales, et donc lorraines, sous la forme d’une collaboration avec les élèves. Iels seront pleinement acteurs.ices de cette recherche, leurs propositions plastiques réalisées durant la résidence venant s’incorporer à l’installation finale.
À l’occasion de Création en Cours, j’emmènerai les élèves dans ma recherche de terrain. Nous analyserons ensemble leur environnement à travers des excursions d’observations spatiales de l’établissement scolaire et de ses alentours. En suivant l'herbier comme modèle, nous récolterons des formes, des motifs, des structures, comme des indices des particularités du territoire, dans l'optique d'en discerner les différentes strates de l'Histoire condensé dans ces traces.
On se posera des questions telles que : Comment une rue, un meuble urbain, une fenêtre, une chaise m’offre des possibilités ou me limite ? Est-ce qu’il n’y a que les murs qui délimitent les espaces ? Est-ce que je peux vraiment utiliser une fourchette à la place d'un peigne ? Est-ce qu’un mur en crépis ou un papier peint imitation brique influencent mes pensées ?
Ces observations seront enrichies par la lecture de textes tels qu’Espèces d’espaces de George Perec, Penser l’architecture de Peter Zumthor, d’introduction des notions d’Hétérotopie (d’après Foucault, la localisation physique d'une utopie) et de Non-Lieux (d’après Augé, espace interchangeable où l'être humain reste anonyme), d’étude d’habitations alternatives telles que le Palais Idéal du facteur Cheval, les maisons imaginaires de Claude Ponti ou le High Desert Test Sites d’Andrea Zittel.
En partant de cette recherche, nous développerons des cartes émotionnelles d’après la Psychogéographie des Situationnistes, ainsi que des maquettes et dessins d’objets développés par nous et pour nous. Nous irons ensuite rencontrer des artisans locaux, pour développer avec leur aide des objet-sculptures qui constitueront le DO.MI.SI.LA.DO.RE. Des objets et maquettes produits auparavant découleront des moules dans lesquelles un verrier local soufflera du verre ou un forgeron coulera du métal. Les enfants pourront ainsi suivre la chaine d'une production d'objet du début à la fin, de sa conception à sa réalisation.
De la même façon dont je procède dans mon processus de travail, nous concevrons parallèlement des catalogues-archives permettant de documenter notre recherche et ses développements.