Le Dévoreur de Couleurs : Fabrication d'univers
Avec :
École Anatole France B
-
Gennevilliers
Kenji et Jonathan sont un binôme réalisateur-producteur qui développe un court-métrage fantastique sur l'adolescence. Le Dévoreur de Couleurs raconte l'histoire de trois lycéens, Alice, Yohan et Violette qui basculent dans un monde onirique où ils sont poursuivis par un monstre voulant se nourrir de leurs cheveux colorés. Pendant 24 jours, Jonathan et Kenji vont travailler avec les élèves d'une classe divisée en trois groupes qui auront chacun la responsabilité d'élaborer l'histoire et l'univers de petits films incluant costumes, décors, design du monstre...Chaque groupe aura l'occasion de créer un univers singulier en équipe. Kenji et Jonathan souhaitent faire connaître aux enfants la diversité artistique qui constitue cinéma. Le Dévoreur de Couleur est un projet où l'imagination des enfants et des adultes se rencontrent pour parler de l'adolescence
Le Dévoreur de Couleurs est un projet de court-métrage de 15 minutes consacré à la différence vécue par trois adolescents. Le film raconte l'histoire d'Alice, Violette et Yohan, trois adolescents aux cheveux colorés qui ne se connaissent pas. Cependant tous les trois partagent un mal être social, conséquence de moqueries et harcèlements. Ils se retrouvent alors projetés ensemble dans un monde parallèle, aux allures d'école primaire, où ils se font pourchasser par un monstre appelé le Dévoreur de Couleurs.
A PROPOS DU FILM - Par Kenji Isidor
La genèse d’un rite de passage :
Adolescent, je n'avais pas l'impression d'être en phase avec la société qui m'entourait. Je sentais une réelle fracture entre “le monde normé” et le mien. Avec le dévoreur de couleurs, je souhaite mettre en image cette dysmétrie que je ressentais alors. Les trois protagonistes de ce film se sentent étrangers dans une société poussant à l’uniformisation. Ils se sentent rejetés et incompris par le monde autour d’eux. Je souhaite ici parler du poids qui pèse sur les jeunes concernant le fait de devoir correspondre à des attendus, trouver un travail, s'insérer dans la société...sans se soucier de savoir si ce sont des choses qui correspondent réellement à leurs valeurs et désirs. Je voudrais raconter dans le film qu'il est possible d'être différent, et de ne pas forcément entrer dans les cases données par la norme. Je souhaite aussi parler du fait que ces personnages marginaux ont souvent l'impression d'être isolés dans notre société, notamment les adolescents. C'est pour cela que j'ai voulu centrer le propos de mon film sur des destins de jeunes en crise identitaire, mais qui grâce à leur rencontre et leur amitié naissante, vont se donner la force et le courage de vivre dans le monde tels qu'ils sont.
Les personnages et décors :
Je voulais que les trois protagonistes de ce film soient liés par leurs cheveux colorés, apportant une originalité au sein d’une vie qui leur semble terne et sans espoir. Alice, Yohan et Violette font face à trois adultes qui incarnent leur hantise d’une société les poussant à être “normaux”. Les héros du film ressentent de l’injustice, ils se sentent incompris et ne sont pas écoutés. Et bien qu’ils aient des cheveux colorés, j’aimerais qu’ils portent des tenues sombres mais dont le style reflète les personnalités de chacun. Alice aura des vêtements grunge dans la continuité de ses parents punks. Yohan sera habillé d’un sweat et jogging abîmés. Et Violette portera une robe gothique élaborée achetée dans une boutique japonaise.
Je souhaite que le monstre et son univers soient directement connectés à l’enfance et que ce monde parallèle et dangereux ait l’apparence d’une école élémentaire. Les écoles sont les premiers lieux où les enfants sont confrontés au groupe, aux règles, à ce qui est autorisé et interdit. C'est le premier lieu où la norme doit être la règle. C'est aussi le premier lieu où la différence peut être rejetée, malmenée et où surgissent les premières blessures identitaires pour les personnes qui, très tôt, questionnent la place qu'on veut leur donner dans la société. L’entité et son dévoreur incarnent cette période cruelle ayant marquée chacun des trois protagonistes. Alors que le dévoreur fonctionne comme un amalgame de peurs primaires, sa maîtresse, la cruauté, est l’incarnation du traumatisme, créature invisible dont la voix angoissante s'incarnera de bien des manières.
Les intentions techniques :
Les plans sur le trio principal seront tournés normalement et modifiés en post-production où sera appliqué un plugin stop motion. Le rendu sera saccadé et renforcera l'aspect décalé des personnages, les sortant de la réalité du monde défilant en 25 images par seconde. Le dévoreur de couleurs sera réalisé en animation à partir de dessins d’enfants. Son apparence changera entre chaque plan comme un esprit insaisissable, incarnant les angoisses à la fois individuelles et collectives des enfants. Je voudrais que ses apparitions soient accompagnées d’une musique composée avec un Thérémine, instrument dont l’étrange sonorité, entre voix et cordes, cristallise parfaitement l’ambiance du film. En ce qui concerne les couleurs et lumières, le monde réel serait traité avec un contraste faible, rendant les images ternes, tandis que dans l’école primaire le rendu serait plus contrasté dans une lumière bleutée pour renforcer la dimension onirique de l’espace. Les chevelures des adolescents seront toujours les éléments les plus colorés de l’image.
Ce que j’aime :
Mon univers s’est forgé au gré de mes expériences et d’un appétit pour les univers fantastiques et oniriques. J’aime les films qui ont des partis pris visuels forts avec l’idée qu’il existe des mondes parallèles au nôtre. Gregg Araki et David Lynch sont deux cinéastes dont j’admire le travail car ils parviennent à créer des miroirs déformés de notre société pour y déceler des violences sous-jacentes prêtes à exploser. Il y a des choses qu’on ne peut expliquer, Araki et Lynch traduisent à merveille ce ressenti. J’ai beaucoup d’affection pour les formes atypiques car je ne trouve pas la vie “réaliste”, je la trouve au contraire profondément énigmatique malgré les efforts de l’humain pour lui donner du sens. Donc que cela soit les objets vivants de Jan Svankmajer ou les monstres solitaires de Tim Burton, je me retrouve dans ces films où le mystère et l’étrangeté marchent main dans la main. Après la lecture d’un manga ou le visionnage d’un film, j’adore quitter une œuvre avec la sensation que son univers va me suivre dans mon quotidien.
Public visé et vie du film :
Par le passé, j’ai réalisé des web-séries et films autoproduits que j’ai partagés sur internet. Ces œuvres amatrices ont conquis un public d’adolescents férus d’animations japonaises et d’imaginaires fantasy. Le dévoreur de couleurs sera mon premier court-métrage réalisé dans des conditions professionnelles. Grâce à ce projet, je compte ouvrir mon travail à une plus large audience. Mon souhait est que les adolescents et adultes puissent se retrouver dans les émotions vécues par les protagonistes. Je pense que peu importe notre parcours, nous avons toutes et tous connu à un moment notre vie, la peur de ne pas réussir à s’intégrer et d’être seul. J’espère que la fin du film véhiculera de l’apaisement et du courage dans la vie de toutes les personnes qui se sentent marginalisées.
Kenji Isidor
La contribution artistique d’élèves d'une classe élémentaire est idéale pour ce projet traitant de cette période entre enfance et âge adulte. Notre souhait est également que par cette expérience, les élèves puissent se rendre compte de la diversité des arts qui constituent le cinéma. Au cours de ces journées, ils pourront s’initier à l’écriture scénaristique et à la création plastique et sonore… C’est aussi un moyen de travailler sur l’entente et le travail d’équipe, de créer le débat, la discussion et l’empathie pour les idées de chacun. Les trois groupes des enfants vont créer leur propre mini-film.
Ces ateliers aboutiront à un festival où sera diffusé bout à bout les films des enfants et le nôtre.
Le film sera tourné dans l'école où nous tenons les ateliers.
Localisation du projet
Publié le
23 avril 2020