Quand nous étions des génies

La synesthésie comme prisme de création.

« La synesthésie est un phénomène neurologique non pathologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés ».  Certaines personnes voient les sons, goûtent la texture des objets, pensent les lettres et les chiffres en couleur ou encore perçoivent le temps visuellement en trois dimensions…

Utiliser la synesthésie comme moyen de créer, inventer, expérimenter permet d’ouvrir un vaste champ des possibles, qui servira à libérer sa créativité ou du moins à la redécouvrir. Un immense terrain de jeu qui permet à l’artiste de créer plus librement.

Le projet « Quand nous étions des génies » fait échos à l'enfance et la dimension créative surréaliste qui l'accompagne. Qui mieux qu'un enfant est capable de créer sans barrière, spontanément, laissant de côté les codes, les cases, dimensions et autres perspectives, qu’elles soient rationnelles ou non. Une maison qui vole, une baleine à trois pattes, un chien bleu qui parle, un bateau qui pêche le bonheur. L'enfant est l'artiste à l’état brut, créatif, volcanique, avec un esprit en arborescence sans souci de la technique. Lorsque l’on grandi, l'inverse se produit. On acquiert la technique mais on se résigne à brider son esprit créatif, le rendant plus lisse, plus conforme, moins fantaisiste. Il rentre sans déborder, dans une petite case identique à toutes les autres.

« Adieu la maison qui vole, de toute façon ça n'existe pas... »

Mais imaginer quelque chose qui n'existe pas c'est déjà lui donner vie, et créer ce que l'on imagine n'est-il pas le propre de l'artiste et des grandes œuvres ou inventions qui l'accompagne ?

Le titre agit comme une sorte de « post-it » de rappel qui s'adresse autant aux adultes qu'aux enfants, pour qu'ils se souviennent qu'ils ont été et seront toujours des artistes.

La résidence artistique « Création en Cours » est nécessaire à mon processus de recherche. Elle me permettra d’élaborer et d’expérimenter des machines surréalistes créatrices d’œuvres, mais aussi d'expérimenter ma propre perception de ce phénomène.  L’utilisation de ces inventions ludiques permettront à n’importe quel individu, adulte ou enfant, de devenir poète pictural et sensoriel le temps d'une exposition.

Sous forme de laboratoire de recherche poétique et surréaliste, les sens, les matières, les couleurs, les mouvements seront mécaniquement associés grâce aux machines afin de donner naissance à un nouveau langage, à de nouvelles formes et sensations.

Un piano qui joue des images, une machine à écrire qui peint des poèmes ou encore un mécanisme qui matérialise la musique en paysage sonore, je souhaite détourner des objets, utiliser le corps, la technologie ou l'artisanat, de la peinture à la photographie en passant par la musique et la danse. Chaque médium est prétexte à création et moins ils semblent avoir de lien entre eux, plus ils seront intéressants de les marier afin de produire une expérience ainsi qu’une œuvre unique.

La notion « d'upcycling » sera également présente, car il est important pour moi d'utiliser directement les matières présente sur place, que ce soit de la matière première local ou alors la valorisation de déchets. Cela permettrait de mettre à contribution et de connecter au projet les habitants, les entreprises et autres acteurs locaux.

Ce processus de création permet de voir la réalité sous une autre forme. Une réalité propre à chacun, à l'instar des grands artistes comme Rimbaud qui associait des lettres à des couleurs dans son poème « voyelles », Kandinsky connu pour ses peintures établissant des correspondances entre couleurs/formes et sons, , Ianis xenakis qui mettait en relation directe musique et architecture, ou encore l'auteur Daniel Tammet qui voit les solutions des calculs mental comme un paysage en associant les chiffres à des formes en couleurs. Le but étant de trouver de nouvelles pistes sur la façon de faire correspondre certain médium.

Outre le coté créatif et artistique, ce travail permet de développer également le multi-potentialisme, qui sommeille en soit, son esprit de synthèse et sa curiosité, qui sont nécessaires au quotidien.

À l'issu de la résidence, les installations donneront suite à une exposition immersive, ouverte à tous, similaire à une sorte de cabinet de curiosité. Je souhaite que les œuvres des élèves soient également exposées. Le public pourra se plonger au cœur d’histoires offertes par les installations et aussi vivre sa propre expérience de l'œuvre. Le partenariat organisé avec les lieux culturels et artistiques de la ville, galeries, artistes locaux, donnera une dimension de partage au territoire et permettra de faire rayonner le projet et d’impliquer autant que possible la ville et ses habitants.