Avant de partir, on se dit « au revoir », on se dit « à de prochaines aventures » sans savoir si l’on se reverra mais avec cette confiance en l’avenir qui fait passer le drame.
C’est souvent comme ça au théâtre. On est pris dans l’entêtement des activités, on fignole dare dare le spectacle, et c’est au moment de la représentation que l’on se met à tout voir sous un jour nouveau, le décor, les visages, tout nouveau comme le jour de mon arrivée, tout éclairé par le départ prochain. La première impression revient, les enfants comme un bouquet de sensibilités, des filaments électriques au langage théâtral naturel dingue inépuisable. L’impression forte d’enfance. C’est cela qui fut la grande révélation de cette expérience, cela qui m’a touché inspiré, l’enfance dans ce qu’elle peut avoir d’idéal, de pur, de complètement fou. J’ai aimé observer, méditer les folies d’enfants. C’est ainsi, dans nos temps de partage, de discussions, d’improvisation que la pièce s’est écrite tissant les paroles et les rêves singuliers de chacun. Ils ont rêvé l’idée folle de ce que serait pour eux le théâtre et ont bien voulu partager avec moi leur folie.
Durant cette expérience, j’ai ressenti en moi-même deux mouvements simultanés, complémentaires, contradictoires parfois, qu’il a fallu articuler : écrire en m’inspirant de la rencontre singulière avec chacun et en même temps assumer avec exigence la nécessité de donner, de transmettre, de faire grandir.
J’ai vécu pleinement cette mission de transmettre, de sensibiliser à la pratique théâtrale. Durant les derniers jours, une fois le texte écrit, j’ai mis l’accent sur la mise en scène, le jeu, avec l’intention de révéler autant que possible leur sensibilité par l’expression théâtrale. Il s’agissait d’articuler, de parler fort, d’être présent aux spectateurs, aux partenaires, de ne pas « chanter » son texte. C’était un travail plus laborieux. Mais je suis heureux et fier de la présentation de notre travail. Nous avons vécu de vraies grandes joies grâce cette expérience, de celles qui nous font à certains moments confondre la vie avec le théâtre et le théâtre avec la vie. Merci !