Bois souple et construction progressive

Lors de la première semaine, j’ai rencontré un sanglier, à savoir une personne qui fait des sangles en bois. C’est un artisanat que je ne connaissais pas et essentiellement local grâce à leur foret de résineux. La sangle est réalisée avec une cuillère après avoir enlevé l’écorce des arbres. Elle est utilisée pour entourer un fromage régional et lui donner son gout. J’ai été très intéressé par cette technique, pensant que je pouvais utiliser des sangles pour les parties de la sculpture qui doivent être fait en bois cintré. Cependant, j’ai pu constater que le bois souple comme du caoutchouc, collant de résine et beige des sangles, en séchant devenait ambré et plus foncé ce qui ne me convient pas pour l’instant car la structure principale de ma sculpture doit être de couleur unie. Toutefois, je souhaiterais travailler avec des sangles, je réfléchis à la manière dont je pourrais les intégrer à ma réflexion. Le Jura accueille également de nombreuses scieries, le travail du bois que j’ai commencé ne prend pas en considération les caractéristiques d’un bois en particulier. Dans les mois qui vont venir, je souhaite expérimenter avec des essences de bois diverses.

Grâce aux conseils d’un habitant, après de multiples tentatives et après avoir revu la largeur des tasseaux utilisés, j’ai réussi avec satisfaction à cintrer du bois en l’ébouillantant pour ornementer l’intérieur de la structure que je suis en train de réaliser. Les courbes sont inspirées des charpentes répertoriées par Viollet-Le-Duc dans son « dictionnaire raisonné de l’architecture ». Je suis satisfaite de trouver que la forme sculpturale que je viens de réaliser est en cohérente et proche de ce que j’avais projeté. Il y a un équilibre entre la densité des lignes, des courbes et une forme davantage synthétique. L’ossature est apparente et ne sera pas recouverte afin de laisser visible l’ornement de la « charpente » qui se trouve à l’intérieur. Intérieur et extérieur notions en plus du mouvement qui aura lieu plus tard dans l’élaboration de ma sculpture. J’ai fait des testes de silicones transparent et en ajoutant de la couleur pour le fuseau qui se trouvera au centre de la sculpture. L’aspect visqueux est intéressant et presque répulsif, une habitante qui est venue me voir a regardé et avait un peu de dégoût face à cette matière.

Aujourd’hui, je suis seule dans la construction de ma sculpture, j’ai souvent été accompagnée par des techniciens lorsque j’étudiais me permettant d’apprendre par l’échange. Quotidiennement, je rencontre avec plaisir des problèmes techniques, de précision, de calcul tel que trouver les angles, des soucis de géométrie, mais de façon empirique je réussis à monter en trois dimensions le toit de ma structure et je commence la deuxième partie qui est plus imposante.  J’avance à tâtons autant sur les variations d’épaisseurs de bois que sur l’équilibre des dimensions ou encore l’anticipation des contingences mécaniques qui auront lieu plus tard dans la réalisation de ma sculpture. Les soucis techniques amènent des informations sur la forme et me permettent de lui donner des caractéristiques essentielles, à l’inverse de la décoration, par exemple pour qu’elle tienne ou pour qu’elle s’ouvre. J’ai auparavant réalisé des sculptures relativement épurées et aux formes génériques. Je souhaite, actuellement, rendre plus complexe les formes sculpturales en ajoutant des détails. Cependant une contradiction se pose, à savoir vouloir ornementer, mettre des éléments qui sont de l’ordre du particulier et parfois du séduisant, et la volonté de faire des formes qui sont construites uniquement par ce qui est nécessaire à leur tenue dans l’espace.