Deuxième article - Construction Commune

Deuxième article - Construction Commune

Publié par Hadrien Basch et Karolina Blaszyk

Après quelques jours d’ateliers fictionnels nous avons cerné les récits autour desquels nous allons continuer de travailler. Le tournage est encore loin mais déjà les premières images se révèlent dans les échanges avec les élèves. Par groupe de cinq ou six enfants, nous avons entre une heure et une heure et demie pour d’abord se pencher sur l’écriture du scénario, avec l’objectif final de réussir à monter et tourner des petites fictions.

L’idée de départ est de partir de leurs histoires quotidiennes pour les amener à construire des récits cohérents, qui diffèrent légèrement de la réalité. La maitresse nous a conseillé de se pencher sur le genre policier, déjà étudié par les enfants en classe.

Pour nous, plusieurs questions ont rythmé ces premiers jours d’écriture en commun.

D’abord nous avons dû insister sur une règle simple : les histoires que nous racontons sont anonymes. Or lorsque l’on demande aux élèves d’inventer une histoire ils piochent naturellement dans leur expérience du quotidien. Il nous faut donc écouter puis reformuler ces récits afin de créer une histoire  inédite et qui puisse intégrer des enjeux plus larges. Progressivement les élèves commencent à se distancier des récits et à inventer leurs propres histoires.

Pour la plupart ils n’ont presque jamais écrit d’histoires véritablement fictionnelles.

D’autres règles simples sont venus construire nos échanges : nous demandons aux enfants de se regarder entre eux lorsqu’ils discutent et pas forcément de rechercher notre approbation. Nous cherchons à ce qu’une discussion s’engage dans leur petit groupe. Notre rôle est de recadrer tout en leur laissant la liberté d’imaginer des scènes inédites.

Nous apprenons en faisant : venant tous les deux du documentaires nous sommes relativement étrangers au monde de la création fictionnelle et de l’écriture de scénario. Cette écriture est d’autant plus difficile puisque partagée et soumise, à chaque étape, à l’approbation de la majorité des enfants. Pour que nos échanges soient plus constructifs nous demandons que les idées proposées apportent systématiquement un intérêt à l’histoire et qu’elles se justifient par une présence à d’autres moments (par exemple qu’un détail décidé au début ressurgisse à la fin pour qu’il fasse sens).

Avec la deuxième classe nous avons imaginé avec la professeure des ateliers de « philosophie ». Chaque semaine, pendant une heure, une question volontairement large est affichée au tableau : « Peut on ressentir la souffrance des autres ? Est-ce toujours bien de partager ? Notre avenir est il déjà écrit ? », par exemple.

A tour de rôle les enfants, assis en cercle, répondent comme ils le sentent. La maitresse reformule ce qui est dit et pour se donner la parole, un ballon en mousse passe de main en main. Lorsqu’ils parlent, les enfants serrent le ballon entre leurs doigts, le remuent de droite à gauche, comme s'ils voulaient lui faire passer leurs paroles.

Pour l’instant, la place de la maitresse a été centrale. Mais un jour elle est sortie quelques minutes pour parler avec la directrice et l’ambiance de la classe s’est transformée, la parole était plus libre et moins conventionnelle. Nous avons ainsi pensé qu’il serait bien que la maitresse se mette en retrait, tout en restant dans la salle. Ainsi cet « atelier de philosophie » se transforme progressivement, mettant en avant la capacité des élèves à s’auto-organiser.