H. Swedish Dog suit pendant une année l’histoire d’un deuil familial à Stockholm, en Suède. En hiver, le fils Bengt perd sa mère Alma. Son père Knut se réfugie immédiatement dans les bras d’une autre femme, Gun. Le fils découvre alors que la relation de son père avec cette femme était secrète et antérieure à la mort d’Alma. Il considère la trahison de son père envers la mémoire de sa mère comme impardonnable, et cherche vengeance malgré l’incompréhension de Berit, sa petite amie. Commence alors une relation secrète et fusionnelle entre Bengt et Gun, la nouvelle amie du père... La suite du roman évolue au gré des oscillations du fils qui hésite entre pardon, châtiment, bonheur et culpabilité.
H. Swedish Dog est la libre adaptation de L’enfant brûlé et du Jeu de la vérité (son adaptation théâtrale) de Stig Dagerman. L’enfant brûlé (1948) est jugé par de nombreux critiques, comme le roman majeur de cet écrivain de la première partie du XXème siècle, perçu à son époque comme le Rimbaud du Nord. Le Jeu de la Vérité est l’adaptation théâtrale, que l’auteur créa quelques années plus tard. J’ai découvert Stig Dagerman et son roman lors d’un voyage à Stockholm en Juillet 2014, conseillé par un ami suédois, Olle Bergvall. Je venais de terminer la lecture d’une autre oeuvre bouleversante La Cloche de Détresse de l’auteure américaine Sylvia Plath qui raconte également le désespoir d’une jeune adolescente dans l’Amérique des années 30. La lecture de L’enfant brûlé fut comme une détonation. Dès la fin du premier chapitre j’ai compris que j’avais découvert une langue, une poésie sublime, un monde, et surtout une façon singulière, une immense acuité à traiter le cercle familial, ses non dits, ses échappatoires. On s’y reconnaît, moi le premier. J’y vois des résonnances avec mes propres souvenirs. La description de l’enterrement lors de ce premier chapitre : l’atmosphère, l’attitude des invités, leur maladresses, leur contritions, la théâtralité d’une cérémonie...Tout est là. Et chacun peut y laisser résonner un semblant de vécu, réel ou fantasmé. Ce qui me questionne le plus dans le rapport familial c’est la notion de poids : poids moral, poids du souvenir, de la faute. Il y a la figure d’un Hamlet vengeur chez Bengt, même si dans ce cas la mère fautive est remplacée par le père, et le fils vengeur n’agit pas par une injonction, mais par sa propre décision teintée de culpabilité et de rancoeur. La famille projette le plus souvent l’individu dans un combat intime perdu d’avance. Il veut se sauver, les sauver, ou les condamner. Il s’arrange pour paraître en distance avec. Il a coupé le cordon. Il s’est émancipé. Il se ment souvent. Entre adolescence et passage à l'état d'adulte, Bengt a l'âge où l'émancipation de la famille est cruciale. C’est un âge où une jeune personne voit plus clairement certaines choses parce qu’elle n’est pas encore habituée aux compromis, aux zones grises de la vie. Tout est plus net, éclairé d’une lumière plus tranchée, les sensations sont comme taillées dans le vif. On s’oriente grâce à une boussole suite aux questions sincères qui traversent le corps. Ces grandes questions qui, pour être posées, demandent du courage, de l’intelligence, une conscience en éveil. Ce sont des questions de fond. Mon désir de l’adapter répond à ma volonté de faire découvrir ce roman au public, en particulier aux adolescents pour qui j’attache une importance majeur dans mon rapport au théâtre, et qui je pense peuvent se reconnaître dans la figure de Bengt .
Note dramaturgique
Faisant le choix de rassembler dans une même partition le roman ainsi que son adaptation théâtrale, dans un montage d'environ 1h, le défi consiste à traiter différentes natures de théâtralité : - Le récit avec un narrateur omniscient qui se caractérise par une façon quasi documentaire (ou scénaristique) de décrire les événements et actions des protagonistes. Il y a là quelque chose du conteur, de la voix off. - Les lettres que le fils s’écrit à lui même et qui s’intercalent entre chaque chapitre du roman (qui seront jouer par l'actrice Morgane Fourcault ), Il y a là un exercice de confession au public qui se répète comme un rituel. - Les dialogues issus de la pièce de théâtre : les personnages si peu loquaces dans le roman, se confrontent dans une plus grande interaction pour se dévoiler les uns aux autres dans un huis-clos autour de la table familiale. Pour donner vis à ces dialogues, je propose une version filmé en différents court métrages racontant chaque fois l'évolution de l'histoire familiale.
On peut donc dire que l'actrice seul au plateau, aura à faire exister les passages de confessions de Bengt, et que ces différentes interventions sur scène au cours du récit seront entrecoupés de vidéos et de récit en voix off.
Note scénographique
Scénographiquement, nous aurons une installation légère, comme un spectacle-kit que l’on peut monter et démonter facilement. En partant d’un élément de base simple : une table et quatre chaises, avec un écran qui projette une image fixe en arrière fond. L’idée est de rendre cette vision d’un intérieur perméable aux évolutions de l’histoire et des quatre saisons. Pour y parvenir, nous proposons une évolution sur la perspective avec une table qui partant du fond de scène, se rapproche des spectateurs tout au long du spectacle. La création lumière est également un enjeu pour traduire les changements de saisons, et traduire une ambiance suédoise si particulière.
Il y a également une toile qui diffusera les différentes scènes filmées auparavant.
Antoine Raffalli
Ateliers Pédagogiques à mener autour de la création.
Avec l'actrice Morgane Fourcault et le metteur Antoine Raffalli, l'idée est de puiser dans l'histoire et sa forme particulière des programmes d'ateliers à mener dans les différents établissements que nous rencontrerons.
En effet la thématique de la famille, et de la communication à l'intérieur de celle ci est un sujet à faire partager, à interroger avec les jeunes écoliers, en adaptant en fonction de leur âge, le récit et son écriture. De même l'adolescence de Bengt, ces questionnements sur les valeurs de bien de mal, de juste, d'injuste sont à rendre comme une question ouverte aux jeunes écoliers qui vivent pour sûr dans leur famille, une relation singulière.
Comme Bengt qui fait des lettres qu'il s'écrit à lui même, nous questionnerons avec nos élèves les différents supports qui existe aujourd'hui et qu'on peut décliner pour rendre compte de l'intimité et de ce qu'on vit par un biais artistique: vidéo, réseaux sociaux, mais aussi écrits, musique.
Nous essayerons de reproduire des éléments de dialogue théâtrale issu de la pièce en cherchant avec eux de nouveaux moyens. Sur scène mais aussi via des films. Eux même pourront réaliser des court métrages en lien avec le projet et qui traitera d'un moment particulier dans la vie de Bengt, d'une saison également (Hiver, Printemps, Eté, Automne) en mettant en valeur le département d'implantation ou nous serons situés.
L'idée étant de découvrir ensemble comment et par quelle forme on peut raconter la famille. Et sa place à l'intérieur de celle ci.
Par le(s) artiste(s)