Sac contenant la précieuse terre récoltée

#3 Piocher le merlon

Publié par Coline Cuni

Journal du projet
Arts plastiques Sculpture Performance, Objet à manipuler

A l'origine le merlon est une levée de terre servant de protection contre la chaleur, les projections ou les ondes de choc éventuelles dans les poudrerie ou les dépôts d'explosifs. 

Tombé dans le langage courant, le merlon désigner un dépôt de terre qui peut servir à maçonner, une terre de remblais. 

Un tas qui se contente d'être là.

En juillet dernier, j'ai rencontré l'association Noria & Co, un centre de formation à l'éco-construction situé dans une commune voisine de l'école, à St Nicolas de Redon. 

L'association charrie un grand volume de terre pour les besoins de sa formation et me propose d'en récupérer pour mon projet de résidence. La terre est argileuse et provient des communes alentours, elle est en dépôt depuis des années suite à des travaux de voirie sur un grand terrain vers la route de Saint-Nazaire, derrière le garage Fiat. Les indications sont minimes, mais je décide d'aller repérer le lieu à la rentrée. 

En septembre donc, tout se présente parfaitement pour mener à bien le projet. Nous imaginons donc une séance où les enfants pourraient venir prélever eux-mêmes l'argile sur un grand talus, un merlon, qui alimente l'association.  

Je vais repérer le lieu avant la sortie. Des caravanes se sont installées là en grand nombre. Le car est déjà réservé, la séance est prévue pour la fin de semaine. Il faut tout revoir. Bien sûr, il n'est pas question d'aller déranger les familles qui vivent ici, légalement ou non cela ne me regarde pas. 

Allers - retours entre le service technique, la mairie de Saint-Nicolas, l'association Noria & Co. Je passe deux jours à étudier la situation et les possibilités pour permettre tout de même aux enfants de réaliser cette première étape essentielle du projet. 

Plateforme technique de l'association
L'association Noria & co nous fournit de la terre, une belle argile rouge. Visite et courbatures...

Noria - Jeudi 17 septembre

Le car scolaire se gare sur le petit parking à 14h15. Les enfants sortent tous, ils ont des seaux, des casquettes, des gourdes ; il règne une ambiance de plage et un soleil de plomb.

Le mardi 15 septembre 2020, juste avant la sortie, un message sur mon répondeur. Une proposition qui sauve le projet. Un des formateurs en charge à Noria & Co me propose de venir chercher la terre directement sur leur plateforme technique. Il leur reste environ 1m3 d'argile dont ils n'auront pas l'utilité. Ce sera l'occasion de faire un tour des réalisations des stagiaires pour découvrir l'application de l'argile en maçonnerie. 

J'accueille donc la classe des CM1 - CM2 à St Nicolas de Redon, sur une friche industrielle délaissée depuis longtemps où s'exerce les apprentis maçons. Ronces, saules, graffiti. Au sol, les dalles de béton se fissurent et la végétation sauvage envahie les recoins de cette zone délaissée. Nous nous dirigeons vers le plateau où se trouve la terre. 
 

L'étape de la pelle

20 sacs remplis par 6 équipes de 3 élèves pour un total de 500 kg de terre!

Peller est un verbe

La récolte de l'argile est organisée dans l'espace suivant un petit "chemin", comme un relais. Celui-ci s'opère en équipe de trois. Un des élèves prélève la terre sur le talus à l'aide d'une pelle, un autre assure les transports avec un seau, et aidé du dernier coéquipier, il transvase le tout dans un sac à gravât.

On recommencera cette opération plusieurs fois : chaque enfant rempli deux seaux de terre avant de passer le relais et de recommencer à un autre poste. Dans l'action, les enfants oublient de compter, les sacs sont plein à craquer! On transvase, on s'amuse avec les pelles, le mouvement est fluide.

La découverte de l'argile commence ici, dans le sol, dans le travail collectif, par la manipulation et le jeu. 

Au final, 20 sacs sont remplis par 6 équipes de 3 élèves pour un total de 500 kg de terre. Environ une demi-tonne !

Après une pause à l'ombre, Florent, le formateur sur place ce jour-là, nous propose une petite visite. Il nous présente l'association et explique aux élèves les formations qu'elle dispense.

Nous déambulons ensuite au milieu des essais de compression, de mélanges et d'analyse d'argile crue. On peut aussi voir le travail d'un mur en pisé en train d'être tassé. Nous admirons un mur de pierres sèches dont le schiste est originaire de la région, et le grès rouge d'Avessac.

Les enfants sont très curieux, ils demandent comment tous cela tient, pourquoi on pose-t-on du bois ici ? Ou bien du verre apparent dans tel mur ? Quel mélange est en train de se préparer ? Ou enfin si ce petit bout de terre ramassé contient de l'argile. Beaucoup d'entre eux en effet mettent dans leurs poches comme des trésors de petits cailloux brillants. 

Mais vite, déjà, le bus retour attend sur le petit parking en face de l'écluse. 
Pour moi, c'est l'heure de charger et décharger 500 kg de terre dans un petit camion pour le stocker à l'école en prévision de la séance de travail de lundi. 

La visite - Commencer à la terre

Les enfants visitent la plateforme technique / Noria & co