Pour cette première semaine passée ensemble autour du "Goût des images", les élèves de la classe me font part de leur enthousiasme à participer à la fabrication d'un film. J'ai très peur, je n'ai jamais travaillé avec des enfants et je ne sais pas si mes histoires et ma pratique vont les intéresser.
Lundi après-midi, je montre, un peu gauche, différents outils de travail : appareils photos, caméras, projecteurs, bobines. Nous discutons de cinéma argentique, de pellicule, de vidéo numérique et de comment raconter des histoires.
Puis nous nous lançons dans la fabrication de sténopés : dispositif proche de la chambre noire permettant d'obtenir des images photographiques. Nous y croyons fort à cette possibilité de créer des appareils photo avec des boites à chaussures. Malheureusement, le résultat n'est pas tout de suite au rendez-vous.
C'est difficile, tout est noir au début. Nous cherchons ensemble, quel pourrait être notre problème.
Les enfants font preuve d'une grande patience et d'une persévérance hors pair. Personne ne veut sortir en récréation avant qu'on ait trouvé comment faire fonctionner nos chambres noires bricolées.
Jeudi, de nouvelles perspectives s'ouvrent, les images commencent peu à peu à apparaître.
Vendredi, tout le monde a pu expérimenter le sténopé. Ça marche ! les CM2 sont parfaitement autonomes. Ils et elles savent construire les sténopés, prendre la photo, la développer en négatif puis tirer un positif. De nos étranges images, nous pouvons commencer à nous raconter des histoires...
Des récits naissent. Une image + une image + une image = un storyboard ? Nous découvrons qu'entre nos différentes images, ce qui change c'est la place de notre regard. De nouvelles questions apparaissent quant à la fabrication de notre séquence.
Quelle place aura Victor dans notre film ? Mais au fait, qui est Victor ?
Regarder un film comme le défilement de milliers de photographies.
Chaque image, singulière et précieuse, au service d'une histoire.
Les élèves se racontent leurs doutes :
"Grégoire :
Cette fois ci, tu crois que ça va marcher ?
Maëlis :
- Non, je crois pas, chez les autres ça n'a pas marché non plus."
Une grande attention au confinement total du papier dans la boite ainsi qu'à l'immobilité de l'appareil doit être observée. Le sténopé, pratique qui semble simple au départ, se révèle bien rigoureuse avec des protocoles stricts pour obtenir le Graal de nos images imaginaires.
Une photographie prise par Aurélie Mignotte.
J'installe un laboratoire de tirage photographique dans une petite pièce - cagibi attenante à notre salle de travail. Les bacs et l'agrandisseur côtoient les cerceaux, les ballons et les agréés de gymnastique.
Zoé :
"C'est super de voir apparaître les images. C'est un peu comme si c'était magique"
Tout le monde se laisse charmer par l'effet du révélateur. Les images montent sur le papier et chacun-e peut rêver à une réalité en deux dimensions, extraite du monde.